dimanche 25 novembre 2007

AP : 1. Vengeance : Chapitre 4

4
"Aussi longtemps qu’on médite sa vengeance, on garde sa blessure ouverte"

[Thomas Fuller]

Terre

Comment a-t-elle pu en arriver là ? » se répéta-t-il. Ou plutot pourquoi ? L’un comme l’autre,Mike s’en doutait, et ce n’était pas ressasser ce genre de détails qui allaient résoudre son problème. Parce qu’il ne pouvait s’empêcher de se sentir concerné. Tout ce qui pouvait toucher Hélène le touchait aussi, d’une certaine façon. Il s’arrêta pour comparer l’adresse écrite rapidement sur un morceau d’enveloppe déchiré et la compara à celle de l’immeuble devant lui. C’est bien là se dit-il en poussant la porte. Arrivé au troisième étage, il frappa à la porte. A peine avait-il retiré sa main qu’elle s’ouvrit et qu’une tornade de cheveux noirs se jeta dans ses bras.
« Enfin te voilà » soupira Hélène avec cette pointe d’accent italien qu’elle n’avait pas réussi à perdre et qui ne faisait qu’accentuer son charme.
Elle se recula mal à l’aise et invita Mike à entrer dans un petit salon qu’il trouva trop classique suivant les goûts extravagants d’Hélène. Les années l’avaient sans doute assagie. Celle qu’il avait en face de lui avait déjà 35 ans. Elle ne ressemblait plus à la jeune fille qu’il avait connue mais elle était toujours aussi belle. Plus même. Mike s’était promis de rester calme mais à peine assis dans le canapé, il s’exclama : « Pourquoi ne me l’as-tu pas dit plus tot ? »

- Pourquoi ? » Répéta Hélène les yeux écarquillés « et c’est toi qui me le reproche. « Maria » cria-t-elle jetant presque sur le bar les verres qu’elle avait sortis « ça fait des années que je te cherche » continua-t-elle en gesticulant en tous sens. « Tu as disparu du jour au lendemain sans même un au revoir. »

Ce n’était pas tout à fait exact repensait Mike. Ils s’étaient dits au revoir. Il l’avait invité à dîner dans un restaurant romantique à la frontière Italienne et quand il l’avait raccompagnée, il avait tenté de l’embrasser mais elle s’était détournée. Pauvre gamin amoureux qu’il était alors, il avait insisté. Il lui avait dit qu’il serait prêt à tout abandonner pour elle et l’avait suppliée de le laisser entrer mais elle s’était contenté de lui caresser la joue comme on le ferait d’un chiot errant avec un air de pitié et lui avait répondu qu’il devait faire ce qu’il avait à faire et qu’elle ferait de même. Ensuite elle était rentrée ne lui laissant qu’une porte close pour épancher son désespoir. Il comprenait mieux maintenant ce qu’elle avait voulu dire.

Elle continuait à parler au milieu de grands gestes et de jurons italiens sensés étoffer les diverses stratégies qu’elle avait utilisées afin de le retrouver.

« Pourquoi n’as-tu pas simplement demandé à Thibault ? » coupa-t-il

Hélène s’immobilisa avant de recommencer à brasser l’air. « tu aurais voulu que je dise ce genre de chose à Thibault ! Non non non non non. Je ne lui ferai jamais confiance. Il serait capable de vendre Dieu lui-même si ça pouvait servir ses intérêts. »

Elle n’avait pas tort. Il lui avait sans doute fallu plus de temps qu’elle pour s’en rendre compte. « Tu aurais pu juste lui demander où je me trouvais.

- Pour qu’il se pose pleins de questions et qu’il me harcèle jusqu’à me faire cracher tout ce que je me garde bien de lui dire ? Ma Mamia, Thibault ne sait pas où je me trouve et c’est bien mieux ainsi. Il est fourbe, vicieux et sans doute plus puissant que sa dégaine d’ado attardé laisse à penser.
Enfin, jusqu’il y a dix jours. Quand j’ai entendu que les autres avaient débarqué, je me suis dit : hé merdre. C’est la goutte en trop. Jusqu’à maintenant, j’ai tout géré toute seule. Je suis forte tu sais. Mais là, ça me dépasse, j'avoue, j'ai eu la trouille.. Dieu seul sait ce que l’avenir nous réserve me suis-je dit. Après, j’ai pensé Dieu et le diable. Et de là, j’ai appelé Thibault pour avoi ton adresse.

- N’exagère pas Hélène.

- A peine quelques heures après mon coup de fil, il avait trouvé ma nouvelle adresse et m’avait déjà rappelée pour me proposer certaines perversions que je m’abstiendrais de préciser. Bref, il m’a dit que tu avais réussi à infiltrer Archuleta mais que tu en étais sorti. Je suppose que la base a disparu de toute façon.

- Sans doute, ca fait quelques années que je suis sorti. Je me suis fait jeter dehors par mon paternel.

- Comment ? Pourquoi ?

A l’intonation de sa voix, elle s’attendait au pire. Il n’allait pas la décevoir. « Il a tout découvert.

- Ma mamia on ne s’en sortira jamais.

- Du calme, on m’a soupçonné de pas mal de choses. Parfois vraies d’ailleurs mais avec le temps, j’ai réussi à berner tout ce petit monde petit à petit et à me faire oublier.

- Même ton père ? »

Non, son père n’était pas dupe. De toute façon il refusait de lui parler. Il s’était senti trahi, mais il se tairait. C’était dans leurs intérêts à tous deux. "Pour l’instant, nous avons des soucis autrement plus graves.

- Mike, ne me regarde pas avec cet air accusateur. Je t’ai demandé aide et conseil, je n’ai pas besoin de quelqu’un pour me faire la morale sur des choses que tu ne peux pas comprendre.

- Ho si, je crois que je peux très bien comprendre. Tu as toujours était bien plus passionnée que réfléchie.

- C’est faux » cria-t-elle en tapant du poing sur le bar séparant le salon et la cuisine. Là, en l’occurrence, c’était parfaitement réfléchi et calculé. Je savais très bien les tenants et les aboutissant contrairement à d’autres puisque je suppose que c’est à l’autre folle que tu fais allusion. L’expérience était tout à fait différente.

- Comment peux-tu parler d’expérience ? » Mais Hélène n’écoutait pas

« Mais comment aurais-je pu prévoir ? » Tout en disant cela dans un soupir, elle s’asseya contre Mike reposant la tête sur ses épaules.
Presque à contre cœur, d’une main tremblante, Mike lui passa les doigts dans les cheveux. Elle était si belle. Après toutes ses années, elle portait toujours le même parfum. Il avait l’impression que c’était hier qu’il l’avait rencontrée dans ce bar mal famé de Boston. Il avait pris une dose d’héroïne trop forte et avait du mal à discerner la réalité des d’hallucinations lui tournant la tête tel un kaléidoscope mais elle s’était imposée debout devant le demi-cadavre avachi qu’il était dans ce squatt ignoble.

« Alors c’est à ça que tu marches » lui avait-elle dit après avoir pris la seringue toujours à ses cotés. Je suis venue te proposer d’autres trips bien plus existants. Est-ce que ca te tente ?

Quand il l’avait vu dans sa veste cintré de cuir noir, une minijupe dans la même matière et un haut de résille sur un soutien gorge noir également, il avait en effet de suite imaginé de quel trip elle voulait parler et il avait accepté mais il s’était trompé du tout au tout. Il l’avait suivie en titubant et ne se souvenait plus de rien.

Le lendemain, un homme d’une quarantaine d’année dans un costume impeccable s’était présenté à la porte de sa maison. Il avait demandé à voir son père et quand celui-ci s’était présenté, il lui avait demandé avec un grand sourire et des yeux brillants s’il savait que son fils se droguait.
Mike lui avait dit de se mêler de ses affaires. De toute façon, son père était au courant. Il avait tenté de le raisonner sans succès puis avait simplement fermé les yeux perdu dans son malheur depuis l’accident qui avait tué sa mère et sa sœur.
L’homme à la porte ne s’était pas démonté ni devant sa rage ni devant le mutisme de son père. Il s’était adressé à son père pour lui dire qu’il avait accepté de participer un nouveau programme de cure de désintoxication et qu’il aurait besoin d’une autorisation parentale vu que Mike n’avait que 16 ans à l’époque. Son père avait accepté sans même prendre la moindre information. Lui avait évidemment refusé mais l’homme s’était contenté de le fixer d’une manière désagréable. « Toi, tu prépares ta valise, je te donne cinq minutes ensuite, on s’en va ». Et, il avait obéi. Il avait suivi cet inconnu. Arrivé à l’aéroport, il avait demandé où ils allaient mais l’homme lui avait répondu qu’il l’autorisait à poser une question et une seule, alors il ferait bien de réfléchir afin de bien la choisir.
Il n’avait pas réfléchi longtemps. « Qui êtes-vous ? » avait-il demandé.
"Je m’appelle Espoir. »
Il s’était moqué : « C’est un pseudo.
Mais Espoir avait regardé le gosse qu’il était alors d’une façon si pénétrante qu’il avait cessé de rire de suite.
« Sans doute suis-je en effet ton unique espoir. »

A partir de là, il n’avait plus rien demandé. Il l’avait suivi dans un salon d’affaire dans l’avion en direction de la France dans lequel il avait retrouvé la femme magnifique qu’il avait déjà entraperçu. Pendant tout le trajet, elle ne lui avait pas adressé la parole gardant une attitude froide et distante. Ils avaient atterri à Nice et de là une limousine les avait conduits dans une petite maison perdue au milieu de la montagne mais il ressentait déjà les premiers symptômes de manque. Il les avait suppliés de lui donner quelque chose pour le soulager. Devant le refus de l’homme, il avait tenté de s’enfuir mais Espoir l’en avait dissuadé juste en lui disant non. La suite était floue. Il savait qu’on l’avait trainé jusqu’à un lit mais que le moindre contact avec les draps le meurtrissait. Durant ses moments de lucidité, il avait découvert Hélène. Au départ, il avait cru dans ses délires qu’il y avait deux femmes. Celle dure et froide mais dégageant un érotisme torride. Et celle chaleureuse et douce dont les mains fraîches venait lui passer des serviettes mouillées sur le front lors de crise de tremblement et de transpiration. Elle restait près de son lit dans la semi obscurité car chaque rayon de lumière lui transperçait le crâne. Elle lui racontait des histoires pour lui changer les idées. N’importe quoi. Les nouvelles du jour, des contes de fée de son enfance, sa passion pour la génétique et les derniers miracles de la science. De temps en temps Espoir venait. Il ne lui disait rien, se contentant de l’observer mais quand il partait, Les désirs de Mike de s’enfuir pour trouver une dose s’étaient envolés.
Qui sait ce qui serait advenu sans ces deux-là.
Il avait fantasmé sur la sensuelle Hélène en tenue de cuir mais il était tombé amoureux de la douce Hélène qui passait des jours entiers à son chevet. Pourtant, une fois remis, c’est avec Thibault qu’il s’était senti le plus proche. Peut-être que l’amour qu’il éprouvait était plus une barrière qu’autre chose ou plus vraisemblablement, Hélène était-elle incapable de s’approcher de quiconque.
« Je ne sais pas ce qu’on va faire Hélène » dit-il continuant à lui caresser les cheveux, « mais tu n’es pas toute seule. Quoique qu’il advienne, je resterai avec toi. »

Maÿcentres :

J’ai confié à Crayon et Miroir le rôle de trouver un emploi leur permettant d’approcher la Terre. Je n’aime pas déléguer quelque chose de si important mais je n’ai pas trouvé d’autres solutions pour l’instant. Dans la réunion d’aujourd’hui, j’ai abordé un nouveau thème. : « Il nous faut absolument quelqu’un de haut placé de notre coté, sinon, nous n’avancerons pas. »
Personne n’a répondu. Les débuts de réunions sont toujours délicats ensuite, les langues se délient. J’ai remarqué qu’il était parfois intéressant de se contenter de banalité pendant la première heure, le temps qu’ils vident quelques verres de leur réserve d’Alccol de rose qui paraît inépuisable. Encore un produit qu’il me parait peu opportun de soumettre à l’importation mais on commence à en trouver sur certains étals de luxe.
Ma question me semblait pourtant anodine. Quoi qu’on entreprenne, il faut toujours avoir des appuis haut placés. Vu la réaction suspicieuse qui m’a répondu, j’ai décidé de remettre ce point à plus tard et aborder le point suivant : « Reste les entrepreneurs qui commercent avec Cashir. Ils doivent savoir eux aussi où en sont les terres Adarii.

C’est Miroir qui a répondu. C’est le plus loquace « Non, Réal nous a dit qu’ils n’en savaient rien. Ils n’ont pas l’accès aux territoires et le périmètre aérien de la planète est surveillé.

- Réal ?

- Réalité, la petite de Cashir avec sa langue acérée. Tu as dû la voir. Elle était là le premier soir où tu es venu » Je m’en souvenais. Ce n’était pas le genre de fille qu’on pouvait oublier

« Comment est-elle venue cette Réalité alors ?

- Elle a séduit un de vos marchands. Un entrepreneur comme vous dites ici. Disons plutot un idiot qui est tombé amoureux d’elle. Il lui a promis une union ou autre bêtise dans le style."

Cannelle a encore marmonné : « amoureux ça reste à prouver. C’était plutot un bon parti oui. Cette gosse est la fille d’un Maître de guilde »

Crayon a pris le relai. Il parle peu mais souvent, en quelques mots, il résume une situation : « cette écervelée a accepté avec l’idée absurde de soumettre le cas de Cashir devant le conseil. Et, elle a presque réussi. Mais une gamine habillée avec des vêtements de chez nous dans le bâtiment du conseil et se présentant sous le nom de Réalité, ca ne passe pas inaperçu. C’est dommage, si elle avait été plus réfléchie et moins impulsive elle aurait pu nous être utile. Plutôt que de traîner en envoyant ses propos diffamatoires, elle aurait pu minauder encore un peu et se faire ses entrées mais elle a tout foiré en quelques minutes. »

J’ai fait remarquer qu’elle a eu bien de la chance de s’en sortir si facilement. Ceux qui l’ont interpellée auraient pu la garder pour éviter qu’elle raconte son histoire à tout le monde. » C’était plus une remarque pour détendre l’atmosphère, évoquer Réalité avait tendance à mettre Crayon et Cannelle de mauvaise humeur et leur faire oublier le but premier de nos réunions. C’est là que Miroir en a trop dit. Je venais de lui resservir un quatrième verre pour lui délier la langue et ma stratégie a réussi au delà de mes espérances

« C’est Luico qui l’a interceptée. Il m’a amené cette petite furie au milieu de la nuit ne sachant qu’en faire. »

Cannelle et Crayon ont regardé Miroir d’un air désapprobateur. Moi, j’étais aux anges. Je me doutais que Luico était de notre coté et voila qui, non seulement confirmaient mes soupçons, mais en plus m’apprenait qu’il avait des contacts avec les ressortissants de Plume. Il restait à savoir jusqu’à quel niveau il était impliqué. Même s’il n’avait plus une position élevée, il pourrait faire un espion intéressant.

« Ne blâmez pas Miroir pour sa distraction. J’ai moi-même des contacts avec Luico. C’est même la première personne que je suis venu voir en arrivant sur les Maÿcentres. J’ai appris sa régression. Triste histoire. Par contre, sa compagne est charmante. »

Crayon me lorgna de plus en plus suspicieux mais j’ai continué sans me démonter. Au contraire, j’ai choisi d’insister « Une jolie femme n’avait que l’embarras du choix, elle ne se contenterait pas d’un simple garde.

- Elle était avec lui quand il était garde du corps personnel d’Eysky et elle n’a pas souhaité changer. Elle est très amoureuse. »
Cannelle a maugrée cela comme on réciterait un discours appris par cœur et a voulu mettre fin au sujet mais j’ai insisté : « Amoureuse ? Les femmes du deuxième satellite ne savent même pas le sens de ce terme. C’est cette fadaise que vous a sorti Luico ?

- Ecoute Thaïs Umia, la vie privée de Luico ne nous regarde pas. Ce n’est ni à toi ni à nous de nous poser des questions là-dessus ».

J’en ai déduit qu’ils en savaient plus. Sinon, ils auraient fait preuve de davantage de curiosité. Quoique, avec les cultures des terres de Plume, ce n’est pas si évident. Ils sont conditionnés à ne pas poser de questions. J’ai encore un peu insisté pour savoir si on pouvait compter sur Luico, sans succès. J’ai décidé de faire une dernière tentative : « D’accord, j’ai compris, on ne parle pas de Luico, vous ne savez rien sur lui et je ne sais rien sur lui. Il n’est impliqué dans rien du tout. »

Miroir a semblé réfléchir et a fini par hausser les épaules. « De toute façon, les grands pontes là-haut évitent de lui dire quoi que ce soit. »

Ses deux compatriotes le fusillèrent du regard mais ne firent pas de commentaires.

« Maintenant, ce serait bien si vous pouviez vous renseigner auprès de quelqu’un qui pourrait savoir s’il y avait des dignitaires contre la prise de Plume. Il faudrait demander à quelqu’un de haut placé. Voire mieux, quelqu’un qui avait accès à toutes les communications entre l’ancien président Eysky et ses conseillers afin de savoir qui était favorables aux Adarii et qui souhaitaient leur pertes. Il faudrait quelqu’un de très proches de l’ancien président, tel que sont ancien garde du corps.

- Luico n’est pas…

- Je sais, il n’est pas concerné mais peut-être pourriez-vous me trouver tout de même cette information."

Cannelle a marmonné qu’il verrait ce qu’il peut faire. Je pense que je ne pouvais pas en espérer plus à ce stade de nos relations aussi, je n’ai pas insisté d’avantage et j’ai repris sur le point suivant : "Donc c’est Luico qui vous a amené Réalité. »

- Nous, on dit Réal. On n’aime pas trop ce peuple qui se permet de donner des noms Adarii à leurs enfants. Et s’il n’y avait que ça. Mais ils ont des propos, vraiment…

- Inconvenant » fini Crayon

- J’aurais pas été si poli mais c’est ça oui » dit Cannelle. « Elle n’a aucun respect pour rien. Si c’était ma fille, je lui mettrais bien une bonne paire de claque pour la calmer. »

J’avais oublié que les cultures de Plume et Saphir étaient si violentes et je me serais bien passé qu’on me le rappelle ainsi. Je ne peux pas dire être très à l’aise face à quelqu’un qui ne se gène pas pour avouer qu’il serait capable de frapper sa fille. J’ai même failli partir à ce moment là mais je me suis repris et j’ai changé de sujet

« Parlez-moi de Cashir »

Cannelle été bien peu loquace sur le sujet - Faudrait demander à Réal, nous, on ne connaît que ce qu’elle nous a dit et ca nous plait pas beaucoup.

- C’est une campagne libre si j’ai compris, je ne savais meme pas que ce concept existait sur Plume. »

Cannelle s’est gratté la tête soudain géné « En fait, nous non plus.

- Comment vous non plus ? Vous voulez dire que vous ne connaissiez pas l’existence de Cashir ?

- Ben moi non » m’a avoué Cannelle.

Crayon a dit qu’il ne connaissait pas non plus en expliquant que c’est plutôt loin de chez eux et que, sur Plume, il n’y a pas les mêmes moyens de déplacement qu’ici. De la part d’un pilote de vaisseaux d’un peuple qui excelle pour les moyens de communication longue distance, cette explication m’a paru très peu convaincante. "Vous avez quelques navettes, des vaisseaux et sans doute d’autres technologies.

- Non, ce sont les territoires qui les ont et les Adarii qui les gèrent.

Oui, sur Plume, la propriété privée n’existe pas sur le principe, mais pratiquement, les Adarii possèdent tout. Même s’ils utilisent d’autres qualificatifs du type : Gérer, protéger, administrer et autres fadaises pour faire passer l’idée qu’ils ont tout et le peuple rien. Un jour je soulèverais ce problème. Mais aujourd’hui, le statut particulier de Cashir est ma priorité. "Ce pourraient-ils que les Adarii eux-mêmes n’aient pas eu vent où aient oublié l’existence des habitants de ce continent ?

- M’étonnerait. La petite Real a dit que l'Adarii Pluie était venue la voir un peu avant que Synshy vienne les envahir. »

Leurs soi-disant protecteurs poussaient le vice jusqu’à laisser leur peuple dans l’ignorance d’un continent entier. Et ils trouvaient ça normal. Pauvres simples d'esprits. Il suffit d'étudier un petit peu les cultures de Plume et on découvre rapidement que derrière les fastes de l’ambassade de Plume, la réalité ressemble à un marais putride regorgeant d’exploitations, de violences et de servitudes.

« Et pourquoi l’Adarii Pluie serait allée en Cashir ?

- Apparemment elle voulait des renseignements parce que Sinshy menaçait d’envahir les territoires. »

Voila la difficulté avec ceux de Plume. J’ai beau m’entretenir souvent avec eux depuis plusieurs mois, il faut toujours leur extirper les informations. On avait ici un point essentiel et ils ne m’en auraient même pas parlé. Et je ne pense pas que ce soit quelque chose qu’ils voulaient cacher mais ils sont comme ça. Dès qu’il s’agit de leurs dirigeants, ils ne disent rien. Je pense que c’est pour éviter de divulguer certains secrets et aussi parce qu’ils n’ont pas le droit de les juger. Même à des millions de kilomètres d’eux, dans un certain sens, ils les craignent encore. Ou ils les admirent encore. Allez savoir. Sans doute les deux. C’est pour cela qu’ils n’apprécient pas Réalité. Elle ne se gène pas pour critiquer leur système et en plus porte un de leur nom. Deux choses inacceptables pour eux. Je la plains cette fille. Je la vois de temps en temps à leurs réunions et je dois dire qu’elle me semble pleines de qualités. C’est une des seules prêtes à vraiment se démener et puis elle est intelligente et vive alors que la plupart des ressortissants des autres provinces ont une attitude passive semblant attendre que leurs protecteurs comme ils les appellent descendent du ciel pour détrôner Synshy et les sortir de là.
Bref, je m’égare là. Je disais que, d’après Cannelle, Réalité aurait confié que Pluie, une des filles de Taegaïan étaient venue voir le père de Réalité, sorte de conseiller local de Cashir. Les Adarii avaient donc des contacts avec eux bien que limités et Pluie avait avoué avoir des ennuis avec Synshy qui les avait menacés. Le seul fait qu’elle puisse admettre avoir ce genre de soucis dénotent à quel points la situation était tendue. Si vraiment ils avaient des moyens de se défendre, ils n’auraient pas eu besoin d’envoyer quelqu’un en Cashir. Voila qui était intéressant. "Donc, les Adarii étaient démunis contre Synshy ? »
J’avais parlé trop vite. Insinuer que les Adarii pouvaient être démuni étaient déjà une offense à leurs yeux et Crayon avait de suite repris sa position défensive « Elle n’a pas dit ça. Elle a juste dit qu’elle était restée deux jours à fouiller dans de vieux archives avec son père.

- Et ?

- Et quoi ?

- Qu’est ce qu’ils ont découvert ?

- Ca ne nous regarde pas » s’indigna Miroir.

Je crains qu’on ne s’en sorte jamais avec eux. Ils sont capables d’avoir des mœurs totalement dépravés et à côté, ils ont un sens moral exacerbé mais uniquement sur des futilités.

« Elle n'en sait rien. » Son père ne l’a pas laissé assister a leurs discussions. » précisa Cannelle.

« Donc, son père est à rajouter dans la liste des personnes qui savent des choses pouvant nous servir.

- Non, il a oublié.

- Oublié quoi ? »

- D’après Réal, il a tout oublié.

J’ai un peu mieux compris la situation quand Cannelle me l’a expliquée.

« Oui, il a oublié ce qu’il n’aurait jamais dû savoir. Le père de Réalité devait posséder des archives qui avaient sans doute été volées aux Adarii. Ce peuple n’a aucune morale je vous dis.

- Vous voulez dire que Pluie lui a effacé la mémoire purement et simplement.

- Dis comme ça, c’est un peu fort. Je dirais plutôt que le père de Réalité avait dû voler des informations auquel il n’avait pas droit et que l’Adarii Pluie a juste récupéré son bien et fait justice. »

Du pareil au même à mon sens. Umia lacha le doigt de son enregistreur mettant fin à son rapport et un ourire illumina son visage. Il détestait le président Synshy. Tous les jours, il souhaitait sa déchéance. Il lui avait retiré ses droits, lui avait ôté son statut. Bientôt, ce serait son tour. Il était conscient de jouer à un jeu dangereux. Sans doute devrait-il se mettre des limites. Mais il était ainsi. Oui, il collaborerait avec une bande de fanatiques qui frappaient les enfants, et dont les femmes se baladaient à moitié nue lui donnant des idées qu’il ne devrait pas avoir. Il serait prêt à faire pire pouru que ça serve ses intérêts. Il retrouvera sa place dans les hautes sphères du conseil et Shynshy tombera en déchéance.
D’un mouvement du poignet, il ôta la petite puce électronique de son bracelet contact. Nota dessus la date du jour et la fit glisser dans une fine poche en plastique en contenant déjà beaucoup d’autres.



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