lundi 7 janvier 2008

AP : 3. Rafale : Chapitre 12

12

Au commencement des temps, les mots et la magie étaient une seule et même chose

[Sigmund Freud

Plume : Cité de Tae : Taegaïan

Donc, je récapitule les idées de la Syhy : On rentre sur les Maÿcentres, on dénonce Synshy, on propose l’élection de la Syhy, on se débrouille pour que le peuple vote pour elle comme nouveau président et on récupère la villa ». Pluie attrapa un jus de fruit sur la table et s’affala dans les cousins du petit salon de Glace. « C’est très résumé » précisa-t-elle

« Ces propos coïncident avec le rapport d’Eclaircie » constata Matinée « mais je ne comprends pas cette histoire de votes ?

- C’est à cause de la politique compliquée de la confédération : Le peuple demande un nouveau président, les ambassadeurs choisissent les candidats et le peuple choisit le futur président parmi les candidats. Ensuite, il y a une possibilité de faire appel afin d’allonger encore la procédure.

- Ils ne se sont pas embarrassés de telles complications pour élire le président actuel.

- Non, car il s’agissait d’un cas d’urgence. En cas de disparition du président le second prend sa place et pour s’en débarrasser il faut recommencer la procédure : demande du peuple, proposition et acceptation de sa candidature, vote du peuple. »

Grésil avait du mal à suivre. Il s’agissait de quelque chose d’important. Important au point qu’on l’avait obligée à sortir. Elle détestait ces réunions politiques mais, si oncle Glace ne voulait pas qu’elle y assiste, c’est que ça devait être intéressant. Elle plaqua son oreille contre la porte en se concentrant pour tenir l’attention des autres à l’écart.

- En quoi sommes nous concernés ? » Grésil hocha la tête, pour une fois, Rafale ne comprenait pas mieux qu’elle. Elle ne distinguait que sa mère par la fente de la porte. Elle comptabilisa les autres membres de la petite discussion à partir des voix qu’elle avait entendue. Il y avait sa mère, Glace, Matinée et Rafale.

« Umia est une pourriture. Il est issu d’une petite noblesse et a acquis un haut statut très vite par diverses complots, chantages et autres manipulations. » Ca c’était la voix de sa maman. Grésil fronça les sourcils. Elle ne parlait pas ainsi d’habitude. En tout cas pas devant elle.

- Je croyais que tu l’aimais bien ?

- Oui bien sur, il est charmant, quand tu peux lui être utile et, j’ai toujours pu lui être utile.

Rafale ne laissa pas la conversation dévier entre Glace et Pluie. « Quels rapports avec nous ? »

- Quand Synshy a pris le pouvoir, il s’est débarrassé d’Umia. Il est vexé. Il veut récupérer sa place au conseil et imagine pouvoir le faire en destituant le président.

« Quel rapport avec nous ? » demanda Rafale pour la troisième fois

D’après lui, le peuple serait prêt à réclamer un nouveau président mais il leur faudrait un déclic. Il imagine que, si nous revenions mettre un peu d’animations sur les Maÿcentres en dénonçant les mensonges du président nous concernant, cela suffirait à mettre le feu aux poudres, si on peut dire.

- Très hypothétique.

- Umia n’est pas n’agit pas à la légère. S’il est venu jusqu’ici, c’est qu’il avait étudié les tenants et les aboutissants. Il est plus doué pour réfléchir que pour agir.

- Imaginons et cette histoire de votes ?

- J’y viens. Le président destitué, il a pour ambition de proposer la candidature de Dyasella

- Pourquoi elle ?

- Parce qu’elle a la carrure suffisante. Sa famille dirige officieusement la plus grande province continent de Vengeance. Elle est soutenue par beaucoup de monde et il pense pouvoir la manipuler aisément pour qu’elle lui fasse ensuite grimper les échelons du conseil.

- Et c’est le cas ?

- Dyasella me parait être une petite chose fragile et très peureuse. Oui, elle semble manipulable à souhait. Mais le plan d’Umia va plus loin. Synshy ayant décrété que Plume et Saphir sont sous le contrôle de la confédération, nous dépendons de leurs lois. Umia voudrait nous utiliser pour qu’on demande au peuple de Plume et Saphir de voter comme les autres membres de la confédération. Voter dans le sens d’Umia, cela va s’en dire. »

Maître Matinée éclata de rire. « Il a osé proposer ça ?

- Non » continua la voix de Glace, « il est trop diplomate pour ça. C’est Eclaircie qui nous l’a rapporté.

- Eclaircie les a interrogé ? » Grésil n’aimait pas voir son frère si ignorant. Il était Annunaki, il devrait tout savoir et tout décider.

« En quelque sorte. » expliqua son oncle Glace

« Et il n’avait pas repéré cette histoire de villa réquisitionnée par Synshy.

- Pluie, ne recommence pas tes chamailleries vis-à-vis d’Eclaircie. Je ne lui avais demandé que de vérifier leurs intentions. Il a obéi. C’est beaucoup plus que ce que je puis espérer de ta part.

- Que pouvons-nous faire ? » Matinée n’était pas marrant, Grésil espérait apprendre pourquoi sa mère n’aimait pas Eclaircie et voila qu’il coupait la conversation.

« Nous ne pouvons pas laisser la villa à Synshy. J’y ai vécu, imaginer qu’il pourrait entrer dans la chambre qui m’a hébergée me rend malade.

- Sur ce point, nous sommes d’accord Pluie. Et sur les autres points.

- Dénoncer Synshy, tant que nous y sommes, pourquoi pas » reprit la voix de Glace « la Syhy je n’ai rien contre elle mais faire voter le peuple non. Ce serait admettre que nous dépendons des mondes extérieurs.

- Je suis d’accord, c’est hors de propos. Nous avons proclamé notre indépendance, nous ne pouvons pas décemment dire que Synshy a inventé notre soumission et agir comme si nous étions soumis En plus, rien ne nous dit que la Syhy vaudra mieux que Synshy, nous ne savons rien d’elle. »

Il y eut un silence, Pluie et Glace hésitèrent se regardant un instant avant de se retourner vers Matinée qui avait fait cette remarque puis vers Rafale.

Pluie finit par prendre une grande inspiration : « Il se pourrait que je la connaisse un peu et Glace aussi, par procuration. »

Grésil entendit des bruits de verres. Sans doute Matinée se servait-il à boire. Ca expliquerait pourquoi il avait fait cette pause dans la conversation.

« Tu la côtoyais sur les Maÿcentres ?

- Pas exactement.

- Qu’entends-tu par : pas exactement ?

Le silence envahit la pièce, interrompu par la toux de Matinée qui s’étranglait. Il reprit le contrôle de lui et s’exclama : « Tu plaisantes Pluie !

- Pas vraiment non. »

Ca recommençait. Dès qu’ils il y avait quelque chose d’intéressant, ils parlaient par télépathie. Ce n’était pas encore aujourd’hui qu’elle apprendrait la nouvelle du siècle. Grésil se concentra un peu plus pour tenter de saisir les pensées de sa mère et de son oncle mais se ravisa de crainte de se faire repérer. Son éloignement de la pierre avait affaibli ses capacités. Elle préféra pousser un tout petit peu plus la porte pour avoir quelques données visuelles supplémentaires sinon, elle ne voyait que sa mère et Glace. C’était un peu restrictif. Là, voilà, c’était mieux

Matinée partit dans un grand éclat de rire tandis que sa mère semblait embarrassée. Rafale était tourné vers Glace qui restait impassible.

« Je n’accepte pas qu’on omette des détails devant moi. Si vous voulez que je vous aide, je veux tout savoir. »

Grésil répéta mentalement les quelques mots de son frère. Un jour, elle aussi parlerait ainsi. Même qu’oncle Glace paraissait gêné et qu’il parlait tout doucement maintenant : « Je comprends Rafale. Cependant, c’est assez délicat.

- Tu crains de choquer mes prudes oreilles ? »

Glace n’avait pas l’air content : « D’accord, si vous insistez Annunaki Rafale. Dyasella était la maîtresse d’Orage ».

Rafale se figea, avant de secouer la tête : « Mon père ! Avec une fille des Maÿcentres !

- Elle est de Vengeance » intervint Pluie

« C’est pareil. C’est, c’est… Je ne sais pas ce que c’est, mais ça ne se fait pas. »

Matinée sourit « je crois que tu as réussi à choquer ses prudes oreilles, mon frère.

- Maître Matinée, sauf votre respect, n’en rajoutez pas. Et toi Pluie, tu l’as laissé faire ?

- Tu t’imagines qu’il me demandait mon avis avant de choisir ses maîtresses ?

- Mais, c’est une fille de Vengeance, elle n’est pas Adarii.

- Ha ça, je lui ai dit.

- Ma soeur qui partageait un homme avec une fille des mondes extérieurs.

- Arrête de rire Matinée. En plus, que je sache, il ne la voyait plus quand j’ai commencé à avoir des relations sérieuses avec Orage. Par contre Tempête si. C’est ta maîtresse qui partageait son homme avec une fille de Vengeance.

- Ces mesquineries sont aussi compliquées qu’inutiles. »

Glace avait repris les choses en mains. Ce n’était pas trop tôt. Ces histoires ne captivaient pas beaucoup Grésil. Elle ne voyait pas en quoi c’était choquant. Après tout, elle était jolie la fille de Vengeance et elle devait être quelqu’un de bien. Si son père l’avait choisie, c’est forcement que c’était quelqu’un de bien. Tout comme sa mère, Tempête ou Brise.

« La seule question est : Pouvons-nous avoir confiance en cette fille ? »

Rafale ne tint pas compte de l’intervention de Glace : « c’est scandaleux » s’offusqua-t-il.

« Calme-toi Rafale. Tu sais, ça n’a rien d’exceptionnel, même ici ce genre de chose arrive.

- Chez toi peut-être » dit Matinée à Glace. « Sûrement pas chez moi.

- Que tu crois. Tu ferais bien de ne pas te voiler la face, sur les mondes extérieurs ce n’est pas trop incommodant, sur nos terres c’est une autre histoire et il vaut mieux étouffer ça dans l’œuf. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai envoyé Chiffre avec Safran. C’est un gentil garçon et dévoué mais Grésil et lui deviennent trop grands pour se côtoyer si souvent. J’ai déjà suffisamment des perversions d’Eclaircie. Je voudrais éviter de rajouter ces deux-là. A peine revenu de Tiyana et ils se font les yeux doux.

- N’exagère pas dans l’autre sens, ce n’est qu’une petite fille.

- C’est ça Pluie, quand elle sera grand-mère se sera encore ton bébé.

- Pouvons-nous laisser ces enfantillages et revenir au sujet qui nous occupe ? »

Glace et Pluie se retournèrent vers Matinée.

« Orage avait confiance en Dyasella, je pense qu’il existait une sincère amitié de la part d’Orage et Dyasella était et est encore très éprise d’Orage. Même prise sur le fait, elle l’a toujours soutenu spontanément. » Dit Glace

« Il ne m’avait pas dit ça » reprit Pluie « cela dit, j’ai eu un entretien avec Dyasella. Elle n’a aucune motivation. Elle est juste embobinée par Umia.

- C’est plutôt positif, elle n’en sera que plus facilement manipulables.

- Il nous manque un point essentiel » précisa Matinée : « Pouvons-nous aller là-bas ?

- D’après l’interrogatoire d’Eclaircie, il y a un champs de force de faible intensité placé autour de la plate forme mais cette protection est posée de telle façon qu’elle empêche ceux des mondes extérieurs d’atteindre Plume et Saphir, dans l’autre sens, la protection est moindre. Bien sur, le plus simple serait de profiter du vaisseau de la Syhy et partir avec eux. »

Les trois frères et sœurs se tournèrent vers Rafale qui s’était reculé dans un coin du salon. Il leva des yeux furieux, mais répliqua calmement. « Le vaisseau de la fille est une opportunité. Cela dit, partir sur un coup de tête est précipité. Et si un jour, nous y allons, se sera par nos propres moyens après avoir élaboré une stratégie d’action.

Glace continua sur le même mode : « L’idée d’Umia est tentante mais utopique, même si nous déstabilisons Synshy, il n’y a pas de raison que Dyasella prenne sa place, nous pouvons en avoir un autre de la trempe de Synshy. J’ai l’impression que nous nous sommes emballés parce que nous avons appris que Synshy avait récupéré la villa Adarii et que nous en avons oublié de réfléchir. Le mettre dehors et s’en aller ne nous apportera rien. Qu’as-tu dit exactement à Dyasella ?

- Que ses problèmes ne nous regardaient pas.

- Je pense que, pour l’instant en effet, nous n’avons aucune raison de l’aider.

- Je suis d’accord.

- Moi aussi ».

Comment osaient-ils tout abandonner ainsi. La déception avait déstabilisé Grésil. Elle avait réussi à tout écouter comme une vraie espionne et elle s’était vue renversée à elle seule le méchant président. Tout cela avait quelque chose de si excitant ! Sa déception était trop grande et elle avait eu la sensation de s’éparpiller.

« Grésil » entendit-elle crier d’une voix ferme derrière la porte mais elle ne répondit pas, elle était trop déçue. Elle entendit encore la voix de son frère : « C’est la pierre, elle arrive à dissimuler ses émotions afin qu’on ne sente pas sa présences »

Elle se mit à courir, s’éloignant à tout jamais de ces lâches. Elle n’avait pas tout saisi mais elle avait compris que Dyasella était une amie de son père, tout comme l’était sa mère, Brise, la mère de Rafale ou la gentille Tempête. Sa mère, était toujours prête à aider Brise ou Tempête, mais elle n’hésitait pas à laisser tomber Dyasella alors qu’elle était gentille elle aussi et puis elle était si triste que même elle, le sentait. Elle renifla, vérifia que les alentours étaient déserts et se remit à courir. De toute façon, ils étaient méchants, Glace avait envoyé Chiffre chez Safran juste pour l’éloigner d’elle.

Très loin, elle avait encore l’impression d’entendre sa mère qui voulait la rejoindre. Elle sentit la voix de Glace comme un souffle de menthe. Laisse là, il est temps qu’elle gère seules ses déceptions, elle est trop grande pour pleurer sur l’épaule de sa mère. Et elle se força à se séparer de la pierre afin de ne plus rien entendre ne gardant juste que la puissance nécessaire pour cacher sa présence aux yeux de tous.

Plume : Cité de Tae : Taegaïan

« Tu voulais me parler Rafale ?

- Oui Maître Matinée. Je voulais approfondir certains détails mais je pense que ça ne concerne pas Glace et Pluie » Rafale hésita. Il était resté seul avec Matinée. Glace était parti. D’autres tâches l’appelaient. En particulier s’occuper de Réalité. Cette fille qui leur tombait littéralement dans les bras était un miracle de chance. A condition qu’elle survive. Dès qu’il avait su de qui il s’agissait, Glace avait envoyé Tempête se charger d’elle. C’était une très bonne guérisseuse mais le cas de Réalité était critique. Même si elle survivait, il faudrait attendre plusieurs jours pour espérer pouvoir l’interroger. Pluie avait suivi Glace, sans doute pour se disputer avec lui au sujet de l’éducation de Grésil.

Rafale devait se montrer fort. Il craignait qu’en avouant ses craintes, ceux qui se reposaient sur lui prennent peur. Quand il avait appris qu’un vaisseau survolait les territoires Adarii, il avait réellement cru que ses cauchemars se réalisaient.

« Nous devons y aller » lança Rafale.

Matinée eut un sourire en coin et s’approcha de Rafale : « Pour la villa, pour cette fille de Vengeance ou pour Shynshy ?

- Nous devons y aller à cause de trois personnes venant des Maÿcentres qui ont vraiment manqué de chance.

- Que veux-tu dire ?

- Je veux dire, qu’il a fallu qu’ils pénètrent notre espace aériens de façon fort peu discrètes, survolent les forêt d’Arkae devant sous le nez de leurs sentinelles qui bien sur ont donné l’alerte, arrive juste sur moi pour que je n’ai plus qu’à faire tomber leur vaisseau. Ils auraient été juste un peu plus discrets où aurait choisi un autre endroit ou un autre moment, et Plume aurait été sans défense. Combien de personnes sont capables de dévier un vaisseau de cette taille ? » Rafale ne laissa pas à Matinée le temps de répondre. Sa question était purement rhétorique, il connaissait la réponse, il y avait songé un nombre incalculable de fois. « Cinq » dit-il en réponse à sa propre question. « Pluie, Fragile, Grésil, vous et moi. Cinq personnes pour deux planètes entières. Et s’il ne s’agit plus d’un vaisseau mais d’une armada. Qui peut lutter ? Grésil et moi à condition d’être à proximité. Et encore, Grésil, je ne suis pas sûr qu’elle trouve la motivation suffisante. Nous tenons sur un bluff. Synshy ne veut pas risquer de nous attaquer car il ignore notre puissance mais pour combien de temps ? Il fait croire qu’il a soumis Plume pour garder la face mais la supercherie ne durera pas éternellement. Si lui ou un autre nous attaquent par surprise je n’ose imaginer le résultat. Nous devons récupérer une place sur les Maÿcentres pour au moins les surveiller et anticiper un éventuel mouvement contre nous.

- Et tu penses que nous devrions accepter les propositions d’Umia ?

- Oui, non. Je pense que, dans un sens, nous n’avons pas le choix. Ce qu’il nous propose est une occasion non négligeable de reprendre une place au conseil de la confédération pour nous aussi et nous en avons besoin.

- C’est possible et Umia l’a sans doute prévu. Il faut se méfier de lui et éviter d’entrer dans son jeu.

- Je suis d’accord. C’est pourquoi je ne veux pas aller avec eux, mais il est tant d’élaborer un plan pour reprendre une place au sein de la confédération. Umia peut nous être utile mais il ne doit pas pouvoir espérer nous utiliser à ses fins. Nous devons y aller mais avec nos propres vaisseaux. Matinée hocha de la tête. « La dernière fois que je t’ai demandé si c’était possible, tu m’as dit que ça ne l’était pas.

- Oui. Je n’étais pas prêt à prendre des risques. Maintenant, nous savons qu’il y a un champ de force autour de la plate forme et que, excepté ce point le passage est dégagé.

- C’est dangereux

- Je l’ignore. Je ne connais pas le fonctionnement des champs de force. Dans tous les cas, il y a toujours une part de risque mais avec Grésil est là, le risque est moindre. S’il m’arrive un problème, il y a un remplaçant.

- Je n’aime pas quand tu parles ainsi. Ce n’est pas parce que Grésil peut te remplacer que tu dois prendre le moindre risque.

- Sans penser au pire, nous pouvons juste nous retrouver coincés sur les Maÿcentres et Synshy peut en profiter pour attaquer

- Dans ce cas, Grésil peut-elle être à la hauteur ?

- Elle a les capacités mais, il faudra lui enseigner encore certaines choses pour être sur.

- Il y a autre chose aussi : Mutine est enceinte de presque 4 mois.

- De toi ?

- Bien sur de moi, sinon je ne vous en parlerais pas.

- Je dois avouer que c’est une excellente nouvelle Un bébé et si vite, c’est inespéré.

- Je fais ce qu’on me dit.

- J’imagine que pour toi, ce ne doit pas être facile Ca te fera des responsabilités supplémentaires et à quinze ans tu en as déjà suffisamment. Je peux me charger de prendre en charge le bébé si tu veux.

- Ecoutez Maître Matinée, nous n’en sommes pas là. Nous verrons d’abord ce que veut Mutine. En ce qui me concerne, j’apprécierais qu’il grandisse d’abord un peu hors de Tiyana.

- Pour que la pierre le harcèle jusqu'à ce qu’il vienne comme elle l’a fait pour Grésil ? »

Rafale se tourna incrédule vers Matinée mais ce dernier reprit.

« Bien sur, j’ai compris que les malaises de la petite et ses crises de cauchemars venaient des appels de la pierre. C’était toi qui la tenais à l’écart.

- Oui enfin non, des malaises qu’elle a eu la journée, c’est vrai, je la tenais à l’écart et si elle en a eu, c’était une négligence de ma part. Mais ses crises de cauchemars, elle a dû les gérer seule, j’étais trop jeune à l’époque pour les maîtriser.

- Et n’est ce pas plus simple pour toi maintenant qu’elle a un lien direct avec la pierre ?

- J’admets, c’est reposant mais je suis désolé qu’elle ait tant de responsabilité si jeune et je ne veux pas cela pour mon enfant.

Matinée s’assit pour réfléchir, Rafale perçut avec soulagement qu’il avait laissé de coté cette histoire d’enfant.. « Rafale, le champ de force que tu crées pour nous protéger entre Saphir et Plume, tu peux le maintenir jusqu’aux Maÿcentres ?

- Trois jours entiers ! Non mais entre les deux plates-formes, ils ne pourront pas nous attaquer.

- Tu en es sur ?

- Il faudrait demander à Jade, il maîtrise bien les technologies de déplacement spatial, de même il poura nous renseigner sur les champs de force..

- D’accord, nous avons besoin de Jade. De qui d’autre ?

- Des très bons pilotes.

- Qui sont les meilleurs ?

Rafale réfléchit et haussa les épaules. « Aucune idée »

« D’accord » conclut Matinée « nous allons voir ce que nous pouvons faire »

Plume : Cité de Tae : Taegaïan

Encore un petit effort. Chiffre s’extirpa du boyau étroit traversant la falaise et d’un mouvement sûr, sauta dans le désert. Il rata un peu sa chute mais les plantes duveteuses amortirent sa réception. Il se releva sans trop de mal et essuya sa tunique couverte de flocons roses tout en trottant vers la plate-forme de décollage.

« Wouha », s’exclama-t-il les yeux écarquillé devant les grands vaisseaux. Il caressa du bout des doigts celui de Taegaïan ainsi que la petite navette. Pour les avoir observés sous toutes les coutures, il les connaissait par cœur. A leur côté, étaient rangé les deux vaisseaux noirs venus de Tiyana. Leurs peintures ressortaient sous le rose du désert et le sigle du domaine semblait briller comme de l’or. Il en fit le tour, le caressant des doigts. Ils avaient été récupérés au Maÿ Hytil des mondes extérieurs, celui qui avait eu la prétention de prendre Tiyana. Ca avait quelque chose d’extraordinaire d’imaginer comment les mondes extérieurs avaient pu être chassé de Plume et Saphir. Il aurait bien aimé voir ça mais il était avec ses parents à Maniya quand Synshy avait envahi Taegaïan. Il avait tout raté. Il tenta de se consoler en se rappelant que de toute façon, il avait un an à l’époque. Il n’aurait rien pu voir mais il aurait pu dire qu’il y était. Le jeune garçon continua à avancer en rêvassant, contournant le renfoncement de la falaise.

«Moche mais énorme » murmura-t-il arrivant en vue de l’immense vaisseau des Lytyl. Il hésita à approcher d’avantage et se colla contre la falaise apercevant plusieurs hommes qui gardaient le vaisseau. Ils se retournèrent et Chiffre se tassa d’avantage contre la paroi. Il avait été repéré. Non, fausse alerte, les hommes ne firent pas un pas vers lui. Chiffre reprit un peu d’assurance et tourna la tête dans la direction que désignait un des gardes. Il aperçut deux hommes supplémentaires entourant la femme des mondes extérieurs. Elle était jolie mais elle avait l’air trop fière pensa-t-il. Grésil disaient que c’était un personnage important, une des dirigeantes de la planète Vengeance. L’idée d’une personne comme elle a un poste de direction était assez bizarre. C’est comme si c’était sa mère, ou sa sœur, elle lui ressemblait trop. Un peu comme si quelqu’un comme lui dirigeait un territoire. L’idée était à la fois intéressante et dérangeante. Il préférait ne pas y penser. Ceux qui gardaient le vaisseau avaient quitté leur poste et en croisant les nouveaux venus avaient entamé la discussion. Il en revint au vaisseau. Il était tout blanc, sans signe distinctif et pas très propre. Il aperçut une ombre se faufiler et passer derrière le vaisseau et écarquilla les yeux. Il devait s’être trompé, il avait pensé voir Grésil. Il devait en avoir le cœur net. Après un dernier coup d’œil au groupe qui entourait encore la dame des mondes extérieurs, il longea la falaise puis courut pour contourner le vaisseau.

« Grésil » s’exclama-t-il se retrouvant face à la petite fille. Elle ne dit rien, se contentant de mettre un doigt sur les lèvres pour lui faire comprendre qu’il devait être discret. Il se rapprocha de son amie. « Que faites-vous là ? » Elle avait les yeux rouges, comme si elle avait pleuré. « Ils ne feront rien » dit-elle « mais moi, je dois faire quelque chose, je suis Annunaki, c’est mon devoir de protéger les gens.

« Je ne comprends pas, que voulez vous faire ?

- Je voudrais aider la Syhy et puis aussi sauver Cashir et trouver celui qui appelle ». Tout en disant cela elle gravit résolument les marches du vaisseau « je pars avec eux ». Chiffre hésita ne trouvant pas les mots pour la retenir. « C’est dangereux, n’y allez pas, Maître Glace ne serait sûrement pas d’accord.

- Je ne resterais pas ici, ma carrière d’espionne est en jeu. Rentre chez toi Chiffre »

Chiffre la vit avec horreur disparaître dans le vaisseau. L’idée de son amie avait quelque chose d’attirant : s’envoler dans les étoiles, sauver des gens mais, ce n’était pas pour de faux. Il ne savait plus quoi faire, perdu entre l’ordre de partir qu’elle lui avait donné et autre chose, autre chose de plus fort. Après un dernier regard autour de lui, il grimpa dans le vaisseau. Il venait souvent les admirer, rêver qu’il s’envolait mais jamais il n’était monté dans aucun de ces vaisseaux. Le temps de s’habituer à l’obscurité et il observa ce nouveau monde, à la fois curieux et inquiet. Tout était étrange, dans des matières inconnues. Il y avait une sorte de salon ou de chambre, il n’aurait su dire, trop large pour des sofas mais pas assez pour des lits. Il ne put aller plus loin dans ses réflexions, des éclats de voix lui parvinrent de l’extérieur. Une main l’agrippa et l’attira dans un réduit attenant à la pièce principale.

« Je t’ai dit de partir » ordonna Grésil.

« Je ne peux pas vous laisser faire ça, je sais que vous devez nous protéger et que je dois obéir mais ça, c’est contraire à mon serment, je me dois de veiller sur les enfants des Adarii, je ne peux pas vous laisser faire quelque chose de dangereux. Venez avec moi. » Il lui prit résolument la main, cherchant à la tirer à l’extérieur mais, dans un bruit sourd, le sas du vaisseau s’était refermé.

Plume : Cité de Tae : Taegaïan

Umia ne supportait plus cette attendre. Il avait vraiment eu bon espoir quand il avait compris que Glace avait pris la tête du territoire. Ils s’entendaient bien tous les deux, du moins, le pensait-il. Il ne pouvait jamais faire confiance aux rapports humains. Les hommes manquaient de logiques. Toute personne réfléchie aurait vu son intérêt dans sa proposition. Les hommes n’étaient pas réfléchi et les Adarii moins que quiconque. Ils n’avaient même pas pris le temps d’écouter le plan dans son ensemble. Les Adarii ne les aideraient pas, leur petite excursion ne passerait pas inaperçue et ils auraient des comptes à rendre. Umia repartait à zéro. Dyasella n’était pas revenue mais il ne se faisait pas d’espoir sur la réussite de son entretien. Il restait la possibilité de dénoncer à lui seul les mensonges du président maintenant qu’il avait la preuve que les territoires Adarii n’étaient pas soumis mais personne ne le croirait. Il était enfermé à l’avant de l’appareil, dans la salle de pilotage et encore une fois, il essaya de débloquer la porte, sans succès. Du bruit le sortit de ses pensées, quelqu’un approchait. La porte coulissa. Il aperçut d’abord Dyasella et deux hommes qui la poussèrent dans la cabine avant de se retirer. Ensuite, celui qui les surveillait depuis une bonne semaine passa l’encadrement de l’ouverture « A votre place, je ne reviendrais plus traîner par ici. Vous savez, le pacifisme, ce n’est pas trop notre truc dans le coin ». Il fit demi tour et Umia entendit le sas extérieur se refermer. Dyasella mettait déjà le vaisseau en route.

« Que faites-vous ? Où comptez-vous aller ?

- Nous partons, évidemment.

- Nous ne pouvons pas partir comme ça. Et Réalité.

- Nous ne pouvons rien faire pour elle. De toute façon, elle est chez elle ici, c’est ce qu’il peut lui arriver de mieux. »

Tout en disant cela, elle enclencha la propulsion MHD sans se soucier d’être en atmosphère et dans un fracas assourdissant le vaisseau s’éleva, plaquant Umia contre son siège. Le silence reprit ses droits et Umia reprit. « Je ne partirais pas, nous allons tenter de nous reposer plus loin, nous ne pouvons pas la laisser entre les mains des Adarii.

- Ils ne lui feront rien. J’ai entendu Glace parler à son aide. Il lui a demandé ce qu’il était advenu d’elle. Je n’ai pas tout compris mais j’ai saisi qu’il disait qu’elle avait été sérieusement blessée et sous le contrôle d’un guérisseur. Glace a ajouté qu’elle était la fille d’un Maître de guilde et qu’elle devait être traité comme tel jusqu’à ce qu’à l’arrivée de son père.

Le soulagement s’empara d’Umia, elle était vivante.

« Comment voulez-vous qu’ils la soignent correctement ? Tout est crasseux ici.

- Umia, reprenez-vous. La médecine Adarii est plus puissante que la nôtre. »

C’était vrai mais il ne s’en sentait pas moins lâche de l’abandonner. Dyasella continuait. Elle disait qu’elle serait mieux ici, qu’elle était malheureuse sur les Maÿcentres. Que ce n’était pas sa place. Umia devait en convenir mais ça ne changeait rien. Il se sentait coupable de l’abandonner. Il en avait oublié le plus important. Et votre entretien avec Pluie ?

- Elle m’a écouté.

- Et ?

- Et rien, elle m’a juste écouté et a conclu que ce n’était pas ses affaires. » Ensuite, j’ai attendu un temps interminable et notre garde taciturne est venu me récupérer et m’a ramené ici.

Plume : Cité de Tae : Taegaïan

Chiffre restait le nez collé contre l’écran protecteur. Il avait vu toute la cité de Taegaïan, il était plus haut que la plus haute falaise de l’oasis et même que les plus hautes montagnes de Maniya. Et puis l’horizon s’était courbé et il n’avait plus vu qu’une boule toute rose sur un fond noir. Une nausée soudaine s’empara de lui et il s’affola.

« C’est parce qu’ils ont enclenché la pesanteur artificielle, ça va passer » lui dit Grésil en le voyant devenir tout blanc. Elle revenait de la salle pleine de caisses, les bras chargés de petites boites métalliques.

« Vous ne devriez pas aller là-bas, imaginez qu’ils sortent et qu’ils vous voient.

- Aucun risque, ils ne sont que deux et ils auront besoin d’être deux à piloter encore un moment le temps de stabiliser et de gérer les coordonnées. C’est un vaisseau, ca ne se pilote pas comme une vulgaire navette ou un jet. Tempête m’a appris à piloter. Enfin, un peu. Je crois que j’ai trouvé des réserves à manger » ajouta-t-elle.

Chiffre regarda les petites boites qu’elle avait ramenées et en prit une en main. Le couvercle s’enlevait aisément et révélait des boulettes informes peu appétissantes mais l’odeur était agréable. Son amie s’était déjà assise et en avait ouvert une autre s’apprêtant à l’entamer.

« Attendez » s’exclama Chiffre beaucoup plus méfiant. Il se rappelait des baies rouges à l’air si appétissantes qui avaient rendue sa grande sœur malade.

« Et si c’est empoisonné ?

- Pourquoi emporteraient-ils de la nourriture empoisonnée ?

- Ce n’est peut-être pas pour manger.

- Pour quoi alors ?

- Je ne sais pas, pour autre chose, vous avez déjà vu de la nourriture emprisonnée dans des boites métallique ? »

Grésil dut reconnaître que non et hésita.

Chiffre lui prit sa boite des mains, attrapa des baguettes en ébène dans la sacoche de sa tunique et avala une bonne bouchée.

Grésil récupéra son bien. « Que fais-tu, tu as dit qu’on risquait d’être malade ?

- Justement, je goûte comme ça, si je suis malade, vous saurez qu’il ne faut pas en manger.

- Mais je ne veux pas que tu sois malade. » Elle prit à son tour une petite baguette pointue dans sa propre sacoche et commença à manger. « Comme ça, on sera malade ensemble. »

Chiffre haussa les épaules et entama sa propre boite. « C’était bon, bien plus qu’il pensait, et puis, il avait très faim. »

Plume : Cité de Tae : Taegaïan

« Nous sommes pris en chasse. »

Umia chercha à apercevoir le vaisseau en question sans succès. « Plume ou les nôtres à votre avis ?

- Les nôtres. Ils vont nous obliger à atterrir sur la plate-forme.

- Ne peut-on les contourner ?

- Et passer pour des délinquants.

- Au point où nous en sommes… »

Dyasella se crispa sur les commandes. Elle en avait fait suffisamment. Elle avait écouté Umia et s’était retrouvé sur Plume où elle s’était faire emprisonnée, maltraitée, rabaissée et tout cela pour s’entendre dire qu’Orage était décédé. Elle n’aspirait plus qu’à rentrer chez elle et se retrouver seule. Non, elle ne lutterait pas contre les surveillants de la plate forme. Ils voulaient qu’elle se pose, elle se poserait. Le voyage du retour sera sans doute plus difficile et l’accueil sur les Maÿcentres ne sera pas cordial. Au fond, ça ne la touchait plus vraiment.

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