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La réalité est cachée, Dieu merci !
[Joseph Conrad]
Plume : Taegaïan
« Tu dis que le peuple des provinces Adarii est opprimé. Pourtant, tout autour de moi, je ne ressens que gaieté et joie, une sorte d’allégresse vivifiante qui donne envie de vivre et de rire. » Les pas de Mutine semblaient des pas de danse au rythme d’une musique lointaine, sur les dallages gris et rose du marché de nuit. De grands flambeaux avaient remplacé la lumière trop vive du soleil et celle, artificielle, que renvoyaient les accumulateurs solaires sur les remparts extérieurs. Les rues bondées quelques minutes plus tôt semblaient s’être vidées laissant l’espace à la jeune Adarii ainsi qu’à sa compagne tandis que, légèrement à l’écarts, les curieux chuchotaient se demandant sans doute qui avait l’honneur d’accompagner l’Adarii Mutine dans les rues de la cité.
Mutine se rapprocha de Réalité gardant avec elle une distance que la fille de Cashir estima suffisante. Elle continuait à parler, intarissable. « Bien sur, tout ici n’est pas que bonheur. Il y a la maladie, la déception, le chagrin d’amour, la colère, la frustration, autant de sentiments qui nous font du mal.
- En gros, ce que vous faites pour les gens de chez vous, vous ne le faite pas pour eux, mais juste pour être entouré de sentiments agréables.
- C’est une façon de voir les choses. Limitée et obtus qui se marie bien avec ta mélancolie mais au fond, quel acte peut être totalement désintéressés ? »
Réalité tendit les mains pour admirer un collier de jade à l’étal d’un marchand. La taille des pierres était remarquable. Plus fine que celle des artisans de chez elle et à fortiori des Maÿcentres.
« Ne le touche pas » ordonna Mutine tendant son bras entre elle et le bijou.
Réalité se renfrogna, qu’imaginait-elle, que ses doigts d’étrangères impurs allaient salir les produits de Taégaïan ?
Mutine parcourut l’étal des yeux. « Ne te vexe pas fille de Cashir, mais si tu touches les produits d’un marchand, cela veut dire que tu veux faire affaire avec lui. Si ensuite, tu ne lui prends rien, tu lui feras affront. Regarde autant que tu veux mais ne touche pas ».
Réalité recula légèrement. Elle comprenait enfin l’animosité des gens qu’elle avait pu croiser durant ses ballades. Souvent, elle caressait les produits dans les étals pour ensuite décliner l’offre des marchands. Qu’aurait-elle pu proposer en échange de leurs produits, elle qui ne possédait rien ? Elle avait eu l’impression qu’ils lui en voulaient et elle s’était renfrognée davantage. Elle n’avait pas pensé qu’il s’agissait juste d’un quiproquo fondé sur des différences culturelles qu’elle ignorait. Mais aussi, on ne lui expliquait rien.
Mutine s’était tournée vers la mer tandis que de nouveaux rythmes de tambour s’élevaient au loin. Elle sourit de plus belle et se tourna vers le marchand. Tu féliciteras l’artisan qui a fabriqué ses bijoux, c’est un travail remarquable et un honneur pour toi d’en faire profiter la cité de Taé » dit-elle en effleurant du bout des doigts le collier de jade.
Le compliment porta et le marchand était plus fier que jamais, complètement avili devant la jeune et belle Mutine qui prit le collier et continua sa route tandis que Réalité pressa le pas pour la rattraper.
« En Cashir » dit-elle. « Chaque artisan est propriétaire de son travail. Personne ne peut s’emparer d’un bien qu’il a confectionné avec art des heures durant, l’échangeant contre un simple compliment.
- Je suis ici sous l’hospitalité de Taegaïan. Ce qui leur appartient m’appartient aussi. Dans la limite du raisonnable.
- N’avez-vous jamais imaginé que ce collier aurait pu lui rapporter une fortune ? De quoi rapporter à manger à ses enfants ? Au lieu de cela, il doit s’en séparer à cause d’un simple caprice d’une jeune fille qui a déjà bien plus de bijoux que son corps n’en peut porter.
- Fille de Cshir, attention à toi, tu as le privilège de m’accompagner, pas celui de m’insulter. Il n’est pas de plus grand honneur pour un artisan que celui de voir ses marchandises choisies par les Adarii.
- Ce n’est pas l’honneur qui fait vivre » maugréa Réalité.
Mutine partit d’un grand éclat de rire. « Ne t’en fait pas, autant l’artisan qui a conçu ce bijou que le marchand ont de quoi vivre. De plus, ils seront largement dédommagés. Il augmentera le prix du reste car sa marchandise aura acquis plus de valeur parce que choisie par les Adarii et les clients n’en seront que plus demandeur. Ainsi va les choses.
Tu es belle fille de Cashir mais tu es la fille d’un Maître de Guilde, tu te dois de faire honneur à ta famille. Ce collier, je ne l’ai pas pris sur un coup de tête, comme tu dis. Je l’ai pris pour te l’offrir, pour te parer suivant ton rang.
- Je ne veux pas de vos cadeaux. Je ne suis pas à vendre. »
Mutine fronça les yeux et Réalité fut obligée de respirer profondément pour contenir la peur qui montait en elle.
« Tu insulterais l’artisan qui a confectionné ce bijou et pire, tu m’insulterais. N’as tu pas suffisamment écouté mes leçons ? Laisse-moi te le mettre. »
Réalité se figea tandis que la jeune femme passait derrière elle, l’effleurant presque de la soie de son sari. Elle ferma les yeux, rongée par l’appréhension tandis qu’elle refermait le bijou autour de son cou, craignant de sentir contre elle cette peau rehaussée d’or qui pour elle était pire que la morsure du serpent.
« Voila » souffla Mutine près d’elle. S’approchant de son oreille, elle se baissa pour être à sa hauteur et murmurer : « je ne mors pas ». Puis elle s’éloigna en éclatant de ce rire scintillant qui la suivait partout. « Allez suis-moi » ajouta-t-elle repartant dans un dédale de ruelles tandis que la route se dégageait devant elle, s’arrêtant ça et là pour grignoter quelques fruits secs du bouts des doigts. Réalité la rattrapa tandis qu’elle attendait qu’un marchand lui prépare une mangue et elle lui en tendit la moitié.
« Vois-tu, fille des campagnes libres, je repensais à ton idéal. Tu dis qu’en Cashir, les hommes vénèrent la liberté, qu’ils donneraient leur vie pour ce concept. En ce qui nous concerne, nous ne demandons pas la vie des gens. Il me semble donc plus rentable pour eux de nous vénérer nous plutôt qu’un concept qui ne leur apporte rien.
- La liberté nous apporte énormément.
- Vraiment ? Ce concept vous apporte-t-il des remparts autour de vos cités ? Des canaux pour irriguer vos champs ? Des ponts sur vos rivières ? Des échoppes pour vos marchands ? Des routes pour voyager ? Et plus que tout, la liberté vous assure-t-elle justice et protection ? La liberté vous a-t-elle protégée des mondes extérieurs ? C’est tout cela que nous fournissons au peuple de nos territoires. La mangue que tu manges et le collier que je t’ai offert te paraissent-ils si chers en contrepartie ? »
Réalité ne répondit pas. La présence de Mutine à ses cotés la troublait. Elle avait du mal à réfléchir posément. Elle finit par murmurer. « Vous parlez de justice. Est-ce par justice que vous voulez vous servir de moi comme appât pour attirer mon père dans un piège ?
- Un piège ! Rien que ça. J’ai entendu parler de ton père comme d’un homme d’une grande intelligence et très érudit. Je pense qu’il savait qu’il violait quelques règles importantes en gardant ses documents en sa possession et encore plus en tentant de s’en approprier d’autres. Il connaissait les risques qu’il encourait. Il a voulu jouer tout de même. Maître Matinée souhaite jouer avec lui, que le meilleur gagne ». Mutine fut obligée de hausser la voix. A chaque pas, le rythme des jumbés s’amplifiait, accompagnés maintenant par d’autres instruments diffusant une musique vive et entrainante
Réalité frissonna. « Ce n’est pas du jeu, mon père n’a aucune chance.
- Alors il ne devait pas jouer. »
Les tambours battaient de plus en plus fort. Au bout de la ruelle, l’horizon se profila à l’infini tel un écran noir, brisé ça et là par quelques flambeaux et la blanche écume des vagues. La musique s’arrêta un instant laissant le bruit de la houle envahir l’atmosphère. Réalité souleva les pans de son sari pour passer au dessus du petit muret longeant la digue et ses pieds nus rencontrèrent la caresse du sable fin. Mutine était déjà quelques pas devant elle. Réalité hésita. Elle avait envie de faire demi tour, de quitter cette fille qui parlait avec tant de désinvolture de son père. Elle hésita. Elle la craignait mais plus encore, elle craignait la solitude de se petite maison. Elle finit par franchir les quelques pas la séparant de la jeune fille. Cette dernière ne se retourna pas. Elle avait senti sa présence, ça lui suffisait. Elle reprit son pas vers un groupe amassé sur la plage. Concentré vers la musique, ils n’avaient pas remarqué la présence de Mutine. Elle éleva la voix pour se faire entendre. « On laisse la place à Mutine de Taïla » lança-t-elle d’un ton impératif. Les quelques personnes à proximité se retournèrent avant de s’éloigner passant le message jusqu’à ce qu’un couloir s’ouvre devant elle. Elle s’y engagea résolument et fit signe à Réalité de la suivre puis de s’asseoir dans le sable à ses cotés devant un spectacle époustouflant ou se mêlait musique mais aussi danseurs et jongleurs maniant avec habileté des torches enflammées.
« La douceur des nuits de Taegaïan n’a pas son égal » murmura Mutine s’approchant d’elle pour se faire entendre sans lâcher le spectacle des yeux. « Cette harmonie vaut bien quelques sacrifices.
- C’est de mon père que vous parlez comme d’un sacrifice ».
Mutine secoua la tête. « Non, je parle des mondes extérieurs. Il y a quelques temps, ils ont tenté de briser cet équilibre. Beaucoup sont morts pour le retrouver. Les sacrifices dont je parle, c’est tout ce qui est susceptible de porter atteinte à cette harmonie. La vie en Cahir devait sans doute être aussi douce avant l’arrivée de vos envahisseurs ».
Réalité acquiesça avec nostalgie. Elle se remémorait les marchés sur la grande place au cœur de la ville, les moissons où tous se retrouvaient pour donner un coup de main. Quand elle était partie, les gens n’osaient plus sortir. Les artisans s’épuisaient à la tache. Mutine parlait toujours comme en écho à ses pensées « Ce qu’on a fait ici, nous pouvons le faire en Cashir.
- Vous voulez dire que vous chasseriez les Maÿcentres ?
- Non, j’ai dit que nous en avions les capacités.
- Mais vous ne bougerez pas le petit doigt c’est ça. Vous dites ça uniquement pour me narguer ».
Mutine secoua la tête. « Je ne vois pas ce qu’on peut faire si vous avez aussi peur de nous que des Maÿcentres. Vous vous dites peuple libre, vous avez juste choisi votre servitude. Les gens d’ici ont choisi de prêter allégeance aux Adarii, ils l’ont choisi librement.
Vous, vous avez choisi les Maÿcentres mais vous ne les avez même pas choisi librement. Quel est le peuple libre à ton avis ?
- Nous n’avons jamais eu le choix. Les Maÿcentres se sont imposés à nous.
- Nous avons toujours le choix. Les Maÿcentres se sont imposés a vous car vous aviez choisi de refuser notre protection. »
Réalité ne répondit pas. Ca ne servirait à rien. La présence de Mutine, La fatigue, la mélopée et les mouvements des jongleurs. Elle avait l’impression que tout tournait. Elle cherchait une faille dans le discours de Mutine sans en trouver. La jeune femme riait et applaudissait devant la prestation des jongleurs qui s’inclinèrent devant elle avant de reprendre un nouveau numéro.
Elle avait l’impression d’étouffer au cœur de tous ces gens. Elle se leva. Mutine ne faisait pas attention à elle. Réalité se fraya un passage parmi la foule et respira profondément l’air marin.
Terre : Nouveau Mexique
Thibault s’assit dans le fauteuil qu’on lui désignait se forçant à prendre l’air le plus confiant et assuré qui soit.
Il reconnut dans la personne face à lui le style vestimentaire des Maÿcentres. Il ou elle, il ne serait dire avec ses vêtements trop larges et ce masque qui lui couvrait les traits. Paraît que c’était une mode de la haute société. Il ne pouvait s’attendre à moins. Depuis le temps qu’on le laissait croupir se contentant de lui dire que quelqu’un souhaitait lui parler. Ce n’était pas pour qu’ensuite, il subisse un interrogatoire avec le premier garde venu. Quand il aura un peu de temps devant lui, il faudra qu’il songe à se renseigner sur les procédures de plaintes pour détention abusive. Enfin, détention, c’est un bien grand mot. Il aurait pu se tirer dix fois. Il avait failli le faire d’ailleurs mais Hélène avait raison. Ils allaient commencer à se méfier. Il fallait que la confédération reprenne confiance en la faiblesse et la débilité du peuple de
Elle ôta son masque. C’était une femme. Thibault siffla intérieurement en la reconnaissant. L’assistante du président en personne. Il ignorait si il devait être flatté ou se méfier. Il finit par se dire qu’il devrait se méfier mais préféra être flatté.
Elle se concentra sur un monceau de paperasse puis dit sans lever les yeux. « Je m’appelle Dhaïs Dya. J’ai quelques questions à vous poser »
Dhaïs, ce n’était pas un prénom, ça voulait dire un truc genre deuxième du nom. Comment le prendre pour un con. Il la relégua au rang de petite parvenue frustrée de ne pas avoir de prénom comme la bonne noblesse de Vengeance.
Elle continuait à parler le nez dans ses feuilles « vous vous nommez Thibault Maltaa.
- Malta.
- Vous travaillez pour nous depuis quatre ans.
- Oui
- Après un an en Europe, afin de renforcer les contacts avec ce continent, sans résultat notable, vous avez été rappelé par le légat Vigosy. Après une semaine de retard, sans motif, vous vous êtes présentés devant le légat qui a noté un problème de santé, sans précision et vous a donné quelques vacances. »
Elle leva les yeux mais ne le regarda pas. Elle se méfiait. OK, il avait la confirmation de son manque de discrétion. « Oui, une sorte de virus exotique. Assez rare.
- Si vous le dites » elle n’en croyait pas un mot, c’était évident. Elle continua cependant « Ensuite vous avez été mandé pour un entretien auquel vous ne vous êtes pas présenté et vous avez de nouveau disparu. On vous retrouve un peu plus tard en Irak en tête à tête avec un dénommé Cyril qui cela dit en passant n’avait aucune autorisation de se trouver sur Terre.
- J’ignorais totalement la position frauduleuse de ce monsieur. Je profitai de mes vacances pour visiter certains sites archéologiques. Je suis féru d’histoire. J’ai fait des études d’archéologie. Vous pouvez vérifier. Bref, il savait que je travaillais pour vous et est venu me voir mais vous l’avez arrêté avant qu’il ait pu me dire quoi que ce soit. »
Elle suivait son rapport des yeux. Elle n’allait pas être déçue, il avait dit textuellement la même chose à ceux qui l’avaient déjà interrogé sur le sujet. Il hésita à lui demander ce qu’ils avaient faits de Cyril. Il le savait déjà par bride à force de sonder tous ceux qu’il arrivait à toucher. Ils avaient eu droit à tous les interrogatoires possibles et avait été transféré sur les Maÿcentres. Ca n’allait pas être évident de le récupérer. Il hésitait à demander l’aide de Mike, il ne s’y était pas encore résolu, il voulait garder les secrets de Cyril pour lui seul. Il sortit de ces réflexions, poussé par la voix stridente de Dya « on vous retrouve enfin, par hasard, sortant d’une fenêtre d’une certaine Emma Diarety en angleterre. Une amie, je suppose ? » Très ironique comme remarque. C’est qu’elle avait de l’humour la Dya. Il faut dire que la fuite de chez Emma avait été épique. Entre la police qui avait débarquée. Emma qui été repartie dans une nouvelle crise d’hystérie et Hélène qui avait été la seule à agir intelligemment en filant le plus vite possible, il avait eu un peu de mal. Il était resté près de l’agent envoyé par la confédération et s’était arrangé pour le dissimuler à la police ainsi que lui-même. Trois agents de police. Il avait réussi à les berner les trois et à faire disparaître le prisonnier aussi. Il en débordait encore de fierté. Quand il avait compris que la grosse limousine noire l’avait repéré, c’était trop tard. Il avait pris le parti de les suivre docilement afin de ne pas éveiller de soupons supplémentaires. « Oui, dans un sens. J’étais un ami de la fille d’Emma »
Dya feuilleta encore dans ses dossiers. C’était un tic chez elle. Elle en retira l’information voulue. « Val Diarety. Pas d’extrait de naissance, Apparaît à l’age de 11 ans et disparait il y a une dizaine d’année, sans laisser de trace.
- Une histoire difficile » il tenta de mettre un peu de sentiments dans l’affaire pour faire plus vrai « au départ on pensait à une fugue. On l’a cherchée pendant des mois. On ne l’a jamais retrouvée. J’imagine qu’elle a été assassinée » Il insista sur ce dernier mot. Parler d’assassinat mettait mal à l’aise ceux des Maÿcentres. Dya ne broncha pas. Si Thibault devait interpréter ses émotions, il dirait qu’elle pensait qu’il se foutait de sa gueule. Ce qui était le cas.
Elle reprit ses papiers, en fit un tas bien net. « Madame Emma Diarety est-elle de votre famille ? »
Thibault hésita. Emma avait dit qu’il les recherchait parce qu’ils étaient de la même famille. Ce n’était pas difficile de savoir ou elle avait péché ça. C’était ce que pensait le mec qu’elle avait transformé en saucisson dans sa chambre.
« Non » répondit-il surtout car il ne voulait pas avoir le moindre lien de parenté avec cette folle.
Dya se mit à réciter. Emma Adoptée Diarety, né sous X d’une mère nommée Malta ».
Qu’est ce qu’elle en savait ? Si elle était née sous X c’est par définition qu’on n’avait pas le nom de ses parents. Quoique il sous estimait peut-être la main mise de la confédération sur le réseau d’information de
- En effet, d’autres comme .Marco et Libéria Malta ?
- Jamais entendu parler. » Pour une fois qu’il pouvait dire la vérité, ça lui faisait bizarre. Dya reprenait, imperturbable. Marco Malta grand père d’une certaine Hélène Giolani et sa sœur Liberia Malta grand-mère d’un certain Mike Gentry. Ca vous suffit ou je vous sors les détails généalogiques ? » Pour l’instant ça lui suffisait. Il voudrait surement en savoir plus mais il devait déjà digérer ça. Sa première pensée fut pour Mike et Hélène en pensant qu’ils s’étaient mariés entre cousins. Eloignés bien sur mais ça le faisait marrer quand même. Il s’était déjà demandé comment Espoir leur avait mis le grappin dessus. Il pensait qu’il avait repéré des potentialités particulières chez eux mais pas du tout. Il s’était contenté de réunir les descendants d’un ancêtre commun ce qui n’était pas évident en soi vu que de nombreux efforts avaient été fait pour dissimuler tous ces beaux petits. Bien sur, tout prenait forme. Emma n’avait rien dit. Sans doute avait-il remonté la généalogie d’Accalmie par sa mère. L’ancêtre commun, il le connaissait. Nana lui en avait parlé et Cyril lui avait raconté son histoire. Elle avait Maltaa pour prénom et personne, même pas les Maÿcentres, ne pourraient remonter plus loin. Ensuite ils étaient redescendus pour les pécher tous. Quand à Marcus, il s’était occupé de lui, il avait financé ses études. Celle de Mike aussi et probablement des autres. Putain. Il aurait dû y penser. Il avait découvert son origine. C’était évident que Mike, Hélène et Emma avaient la même.
Dya attendait. Elle pouvait continuer à le regarder avec son air suffisant, Il n’en avait rien foutre. Elle ne pourrait rien prouver. Au pire, si elle lui faisait des misères, il userait de ses toutes nouvelles capacités. Il n’en ferait qu’une bouchée. Elle regardait son bracelet contact, le genre de gadget qu’il devrait trouver pour lui. Elle marmonnait. Thibault entendait comme un décompte dans la langue des Maÿcentres. Au zéro, il y eu une explosion dans sa tête, il bascula. Sa chaise se renversa sous son poids et il se retrouva à terre. Dya souriait. « Pile à l’heure » dit-elle regardant encore son petit écran.
Maÿcentres : Colline du conseil
Mike secoua la tête. Il était tombé du lit. Non, on l’avait poussé et frappé. Une douleur cuisante résonnait dans sa tête et Thibault s’inquiétait dans un coin de son esprit. Il jura en se retrouvant face à face avec trois hommes qu’il reconnut à leurs uniformes comme faisant partie de la garde présidentiel. D’une pensée, il transmit la situation à Thibault et le chassa pour se concentrer sur ses agresseurs. La partie se corsait. Il se releva d’un bond et fonça dans le tas. Il ignorait ce qu’on lui voulait, mais personne ne venait en pleine nuit frapper quelqu’un avec de bonnes intentions. Le plus imposant des trois se mit en travers de son chemin. Ce n’était pas des hommes des Maÿcentres. Ils portaient un écusson du deuxième satellite accolé à celui de la garde présidentielle. Il hésita. Il ne pourrait les obliger à le laisser passer. Entre influencer des actions ou les faire désobéir à un ordre il y avait un cap qu’il n’était pas parvenu à franchir. Contrairement aux hommes des Maÿcentres, ces hommes savaient se battre. Mais lui aussi. Il ne leur laissait pas le temps de dire le moindre mot. Il frappa.
Terre : Nouveau Mexique
Dya Jubilait et le pauvre idiot ne comprenait rien. Tout ce déroulait comme prévu. Bien sur, elle aurait préféré se tromper. Quoique, au fond, elle était assez satisfaite de les avoir démasquées. Le président serait fier d’elle.
« Ne t’en fais pas pour lui, nous sommes un peuple pacifique » elle se complut à mettre toute l’ironie possible dans ses propos. Depuis six ans, elle formait une véritable armée, des hommes qui n’avaient pas peur de se battre et même de tuer mais Mike n’avait rien à craindre. Elle était bien décidée à le laisser filer juste pour voir chez quel traitre il irait se cacher. Elle ne se contenterait pas de lui. Elle s’en servirait pour retrouver Accalmie. Elle avait juste commandé à ses hommes de lui faire une belle frousse pile à cette seconde précise, puis de faire semblant de l ‘interpeller mais si il voulait fuir de le laisser partir en prenant soin de ne pas perdre sa piste pour voir les partisans chez lesquels il irait se terrer. Ils s’étaient sans doute moqué de cet ordre qui avait dû leur paraître farfelu. Qu’ils pensent ce qu’ils veulent, quand ils sauront le plan génial qu’elle avait élaboré, ils la respecteront. Et ça avait marché. A la seconde près, le pauvre Thibault en avait été tellement surpris qu’il était tombé de sa chaise. Il ne s’en était pas encore tout à fait remis. Il n’avait pas encore compris. Qu’il essaie encore de faire son fier et de lui faire croire qu’il n’avait aucune capacité télépathique. Elle fit signe à Ansilme, derrière le miroir sans teint, de tenir prêt les enregistrements et de les mettre en lieu sur. Il ne fallait pas négliger la moindre prudence.
Malta avait repris son sourire arrogant pour lui débiter de nouvelles excuses. Elle ne se donna pas la peine de répondre. Son sourire disparut petit à petit et il finit par se taire. Il la regardait, elle, puis la pièce mais elle savait qu’il était concentré sur autre chose. Il la fixa à nouveau, son sourire évanoui. Il avait compris. « Sale pute » s’exclama-t-il
Il pouvait l’insulter, ses grossièretés la laissaient indifférente. Sa victoire était trop belle.
« Emparez-vous de lui « dit-elle calmement
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